jeudi 14 août 2014

Hier j'ai re-noté tous les livres de Houellebecq sur senscritique; je leur avais d'abord attribué une note ridiculement basse en première, période durant laquelle je m'étais persuadée d'avoir aimé ses livres uniquement parce que je les avais lu trop jeune. 
Au collège nous étions un petit groupe à l'avoir lu et Victoria m'avait raconté qu'en commençant les particules élémentaires elle avait eu ses règles pour la première fois, insinuant par-là que le rapport de cause à effet était indéniable. Comme si lire Houellebecq, par un miracle épatant, pouvait rendre plus adulte, plus femme. 
Nous essayions d'imiter sa manière de fumer, en tenant la cigarette entre le majeur et l'annulaire, son parlé très lent, nous avions l'air idiotes. J'avais commencé mon sujet d'invention au brevet (celui sur le clochard, peut-être ceux qui l'ont eu s'en souviennent) par "dans la vie tout peut arriver, et surtout rien ". Il y avait aussi ce grand coffret inrocks qui trônait dans notre bibliothèque, avec sa tête en grand, comme ça, et ma mère disait qu'il était laid, je lui répondais "pas vraiment" en pensant pas du tout.  
J'en parle parce que j'ai lu un article sur lui dans un de mes blogs favoris et repenser à cette époque m'attendrie. 
Aussi mon année de troisième trouve un écho parfait dans celle de terminale, je ne peux plus revoir l'une sans songer à l'autre. J'avais relu Houellebecq à cause de Monsieur C., nous en parlions souvent, c'était un de nos sujets préférés, inépuisable. 
Je voyais en lui une sorte de Houellebecq II, parce qu'il aimait Kraftwerk, Françoise Hardy et Neil Young, parce qu'il avait toujours l'air las et qu'il fumait trop; ils étaient dans mon esprit rigoureusement parallèle l'un à l'autre. 
Monsieur C. m'a donc malgré lui réconcilié avec une partie de mon adolescence et Houellebecq I. Merveilleux. 

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Le tourisme de masse défigure Florence. Rectification : le tourisme de masse défigure absolument tout, mais en l'occurrence florence y est particulièrement sujette. Vraiment, c'est idiot, mais voir ces gens prendre en photo tout et n'importe quoi, se mouvoir bêtement d'un point A à un point B, persuadés de pouvoir faire ce qu'ils veulent, se tenir comme ils l'entendent parce qu'ils ne sont pas chez eux, m'ôte le plaisir d'être dans une des plus belles villes du monde. 
Le tourisme n'est pas une solution, c'est un problème, un énorme problème qui rend le monde étroit, uniforme et laid. 

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Toujours très surprise de constater  combien vivre, le quotidien, les petites choses, faire les courses, demander une place de musée, parler avec la caissière, surtout dans une langue qu'on ne maîtrise pas parfaitement, dépasser la peur de ne pas comprendre et celle de dire des bêtises, bref, combien tout cela demande un immense amour de soi, une confiance sereine en sa personne. 
J'avais vu une interview, ou enfin je ne sais pas bien ce que c'était, mais disons une vidéo où Desplechin racontait une scène de Ma vie sexuelle, celle où la porte automatique refuse de s'ouvrir devant paul Dedalus. Desplechin disait, si ma mémoire est bonne, que Paul comprend à ce moment là à quel point il existe peu, qu'il n'existe même pas assez pour que cette porte le détecte. Alors il a sa thèse dans la main et il fait des grands gestes en espérant tout débloquer, il se dit peut-être la thèse, c'est un objet, peut-être qu'après tout elle existe plus que moi. Mais ça ne marche toujours pas. Finalement la porte s'ouvre avec le passage de trois jeunes filles qui ne se rendent compte de rien. 
Je n'avais pas remarqué cette scène, je n'en avais pas gardé le souvenir, mais la manière dont Desplechin en parlait m'a beaucoup plue (l'impression que ses films sont toujours mieux quand il en parle que quand on les voit, de toute façon). 
C'est un peu le sentiment que je me fais ces temps ci : j'ai l'impression d'être paul Dedalus devant cette porte qui refuse de s'ouvrir, et voir les gens vivre sans y prendre garde, faire naturellement tout ces petits gestes qui me semblent laborieux, m'épate assez. 

jeudi 7 août 2014


J'étais tellement amoureuse de lui dans mon rêve qu'au réveil je n'étais plus sûre de l'être dans la réalité. Normalement c'est l'inverse: on rêve qu'on est amoureux de quelqu'un et le lendemain on se dit comme ça "et si c'était vrai ?" - preuve ultime que c'est déjà trop vrai pour qu'on puisse y faire quoique ce soit d'ailleurs; mais moi ce matin je me suis dit plutôt comme ça "et si ça n'était qu'un rêve ?".

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Je voudrais pouvoir dire : ça y est, le délire est passé, je suis à nouveau capable de vivre sans penser constamment à cette personne dont le prénom ressemble joliment à une énorme faute de frappe, sans regarder Facebook toutes les cinq minutes pour vérifier qu'il n'y ait pas un signe de vie de sa part et sans constamment hésiter à publier n'importe quoi qui lui rappellerait a) mon existence, b) le fait que je sois en italie (il pourrait me demander comment ça se passe, par exemple) et c) qu'il doit m'envoyer son mémoire. Parce que son mémoire, entendons nous bien, même s'il ne ressemblait pas à Aleandro Rosi en plus beau, même si c'était le sosie de Mr Bean je mourrais d'envie de le lire - mais à ce moment là je n'aurais aucun scrupule à lui envoyer un message, ou dix ou mile, et sous la pression de mes relances incessantes il me l'aurait sans doute déjà fait parvenir. Triste mais vrai.

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Dans un article précédent je me demandais ce que pouvais bien vouloir dire "manquer de réalisme" en matière de foot. J'ai depuis trouvé ce que ça voulait dire dans la vie. Quand tu rencontres ton idéal, qu'il n'en a rien à foutre de toi et que parallèlement tu plais à quelqu'un qui a objectivement tout pour te plaire, et qui d'ailleurs te plaisait il n'y a pas si longtemps mais dont tu te moques éperdument maintenant que tu es folle amoureuse de faute-de-frappe et qu'en fin de compte tu te retrouves seule comme une conne, on peut dire que dans ta vie, là, tu as singulièrement manqué de réalisme. 

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Être dans un tel état m'empêche de penser à florence et à la vie que j'y mène, de voir les autres qui m'entourent, les élèves, les profs, tous ceux avec qui je ne peux pas parler de mon état parce que je ne les connais pas assez. Or, c'est le seul sujet qui m'intéresse et ceux qui en sont exclus sont de fait comme hors de portée. Les problèmes, les issues, tu crois que je devrais faire ci ou ça... enfin finalement je ne fais rien et rien ne change. Aussi il y a cette possibilité semi ouverte, absolument pas raisonnable mais malgré tout existante, de partir à rome cette année et j'essaie toujours de savoir pourquoi je veux tellement partir, si c'est surtout pour lui autant rester à paris, si c'est pour autre chose nous pouvons l'envisager plus calmement. Mais tout se brouille toujours au moment de démêler les raisons.