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Juillet a filé à toute allure et nous prévoyons en catastrophe quelques sorties, à calvi ou dans le cap, mais concilier nos emplois du temps semble souvent impossible, comme si au lieu d'être des étudiants en vacances nous étions des premiers ministres coincés par mille engagements.
J'ai du mal à croire qu'il ne me reste plus que cinq jours de travail et un peu plus d'une semaine avant de partir pour l'Italie. J'ai hâte et en même temps je dois avouer que Bastia ne m'a jamais semblé si agréable. Se retrouver à l'Albert, pour une glace à l'Idéal, sortir prendre sa pause au jardin suspendu de la citadelle, regarder Capraia et l'île d'Elbe, la mer, le port, la ville, profiter du silence peut rendre une journée réussie.
Au travail je me suis aussi fait des copains avec qui je rigole bien; nous nous sommes liés tout naturellement dès le premier jour et j'ai pensé : faire ma vie avec ces gens là me plairait, j'apprécierai qu'ils soient mes collègues, mes voisins ou pourquoi pas des amis, voire les trois à la fois. Si je reviens après mes études (ce que je suis résolument décidée à faire) c'est sans doute ce que, de fait, ils deviendront. Nous voulons tous vivre ici.
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Je dis et pense beaucoup "nous". Pourtant je me souviens que quand j'étais petite mon cousin disait très souvent nous pour parler de sa bande du village et je trouvais ça insupportable, j'avais l'impression qu'en les incluant malgré eux dans ce cercle imaginaire il empiétait de force sur les autres. Surtout j'étais gênée à l'idée qu'ils puissent de leur côté ne jamais mettre mon cousin dans leur "nous" à eux tandis que pour lui leur unité ne faisait aucun doute. Peut-être que si ce souvenir me revenait plus souvent en mémoire j'emploierais moins facilement la première personne du pluriel.
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Je sais que la question d'où l'on va faire sa vie n'a aucune importance pour la majorité des gens et que celle qu'elle revêt pour moi peut sembler démesurée, au point d'en devenir même un peu ridicule. Je vois bien que pour beaucoup ici et ailleurs se fondent dans une espèce de gros tas informe, qu'il n'y a donc aucun enjeux à choisir l'un ou l'autre. Et je trouve ça très triste.
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S'ella si pudesse rivive
un'ora di a so giuventu',
vulerebbi vive, stasera,
l'ora di quella sera luntana
ch'eo ti vidi la prima volta,
Cità d'ogni core,
e a te, docile, m'abbandunai,
briacu da l'umida voce
di le to' centu funtane.
O' Roma cara, o' a miò cità,
si sempre quella?
O forse ancu tu si mutata
cum'ella mutò la miò stella?
Ma no, chi u teni sempre caru
quellu figliolu chi turno'
-Mill'anni era durata l'assenza!-
A u to senu callu e maternu,
da inquiete generazioni.
Toujours ultra-méga-giga décidée à partir vivre un temps à Rome quand même.